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DESTINATION CENTRE MARTINIQUE

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Séjour capitale en terre créole

Fort de France est un voyage pour le plaisir des yeux et des sens et, avec sa région, un condensé de la Martinique. A l’ombre du piton du Carbet, vieux volcan qui témoigne d’un passé né de la mer, vous découvrez entre mer et montagne, villas créoles et belles plages de sable blanc, un millefeuille de paysages et tout un imaginaire autour des mornes. Ils racontent l’histoire de ceux qui ont construit ce pays et dont restent des saveurs qui vont épicer votre séjour et des savoir-faire aux nuls autres pareils. Enfin, observez les couleurs de la baie du lamentin pour un bouquet final inoubliable.

Les récits de la mer

Et si l’histoire du Centre Martinique vue de la mer m’était contée

Un havre sur la route des Antilles

Fort de France est un voyage pour le plaisir des yeux et des sens et, avec sa région, un condensé de la Martinique. A l’ombre du piton du Carbet, vieux volcan qui témoigne d’un passé né de la mer, vous découvrez entre mer et montagne, villas créoles et belles plages de sable blanc, un millefeuille de paysages et tout un imaginaire autour des mornes. Ils racontent l’histoire de ceux qui ont construit ce pays et dont restent des saveurs qui vont épicer votre séjour et des savoir-faire aux nuls autres pareils. Enfin, observez les couleurs de la baie du lamentin pour un bouquet final inoubliable.

Depuis le passage de Christophe Colomb la Martinique reste oubliée des grands colonisateurs de l’Europe, servant simplement d’escale pour approvisionner en eau et en bois les navires qui se dirigent vers le Mexique et le Pérou. Des populations sont pourtant bien présentes sur l’île. Ces amérindiens venus de l’Orénoque ont peu à peu glissé des terres du nord vers les baies et les anses de la côte Caraïbe. On peut les imaginer à l’Anse Madame, installés à l’embouchure de la Rivière Case Navire ou dans la baie de Fort Royal, à proximité des cours d’eau qui descendent des mornes, accueillant ces étrangers de passage et leur offrant fruits et tabac en échange de quelque pacotille ramenée du vieux continent.

Une escale pour pêcheurs et navigateurs de tous bords
La Case Navire est connue de vieille date. Avant la colonisation de la Martinique, les Caraïbes viennent y pêcher le poisson et les marins qui naviguent aux Antilles savent qu’on y trouve un excellent mouillage, des possibilités de ravitaillement en eau douce de bonne qualité et en bois; c’est l’endroit rêvé pour faire escale et c’est pour cela qu’ils l’avaient baptisé du nom de Case des Navires.

Un peu plus tard, au XVIIème siècle, quand les Français viennent s’installer dans la baie de Fort Royal, des cases y sont construites. Elles servent pour la maintenance des embarcations (d’où le nom originel du site! : Case des Navires), l’embarquement des marchandises et le débarquement d’esclaves, comme à la pointe des Nègres. Sur la carte de Nicolas Vischer II (milieu XVIIème siècle), Case des Navires est signalé comme étant un lieu pour le pesage des marchandises ( on y trouve le « poids du Roi »), c’est-à dire un emplacement autorisé à réguler le commerce et garantissant l’application des mesures officielles.

Des terres à sucre
C’est en effet sur ces terres que l’on trouve les premières plantations de canne à sucre, de cultures vivrières, de tabac. Le relevé fait par les pères Labat et du Tertre en 1671 signale également la culture du cacao, du café et du coton. Le sucre n’y devient la principale production qu’à partir du XVIIIème siècle mais l’économie du quartier est dominée par l’économie de plantation et la traite négrière. Le plan de l’île de la Martinique dressé par Houël (1729) montre que les habitations occupent déjà, au début du XVIIIème siècle, une bonne partie du territoire de Case-des-Navires. Elles s’organisent en fonction du relief et de l’accès à la mer, mais restent cependant isolées et dispersées. Aujourd’hui encore, la toponymie de nombreuses localités de la commune vient de l’implantation ancienne d’habitations-sucreries (Fond-Collat, Fond-Duclos, Fond-Lahaye, Fond-Rousseau) qui se sont développées bien avant que Case-Navire ne devienne un véritable bourg.

Jusqu’en 1730, il n’existe qu’un petit établissement dénommé Case-des-Navires, à proximité d’un lieu de culte fondé par les moines jacobins (1659) à l’époque des premiers défrichements. Les Français occupent le site de la Case-des-Navires plutôt que celui de l’anse Madame parce que la plage, située au sud de la rivière, est plus propice au débarquement des chaloupes. A la fin du XVIIIème siècle, le site est fortifié grâce à la construction de batteries, de plan carré et circulaire, pour défendre la côte et les sucreries naissantes. La batterie de sainte Catherine est intégrée au dispositif défensif du Fort Saint-Louis et au réseau de fortifications et de fortins qui s’étend des Anses d’Arlet jusqu’à Case Pilote pour protéger la baie de Fort-Royal de toute invasion !
Aujourd’hui les barques des pêcheurs et les embarcations de voile pour le loisir des habitants et des vacanciers ont remplacé les canots chargés de sucre, de pétun ou de rhum. Mais cela reste tout comme par le passé un lieu enchanteur pour une escale détente au bord de la mer des Caraïbes.

L’idée d’un fort au sud de Saint Pierre s’impose

Mais revenons le 25 juin 1635, quand de L’Olive et Duplessis débarquent au même endroit que Colomb, et prennent possession de l’île au nom de la Compagnie des Îles d’Amérique. Ils y plantent donc la croix, pour signer l’appartenance de ces nouvelles terres à la France, mais n’y restent pas et continuent leur périple vers l’île voisine de la Guadeloupe. C’est Pierre Belain, sieur d’Esnambuc, parti de Dieppe et passé par Saint Christophe où il devient gouverneur et recrute 150 habitants, qui débarque ensuite le 15 septembre de la même année un peu plus au nord que ses prédécesseurs, élève aussitôt un fortin à l’embouchure de la rivière Roxelane et prend possession de la Martinique au nom du Roi de France.

Alors que la majorité des Caraïbes avaient privilégié la côte au vent (côte atlantique), l’implantation des colons français se fait dès 1635 sur la côte-sous-le-vent (côte caraïbe). Sur le site de Saint-Pierre, elle commence par la construction d’un fortin à l’embouchure de la rivière Roxelane.

Cependant dès les premiers temps de l’occupation, l’idée de créer, indépendamment du Fort Saint-Pierre, un autre centre important de population, s’impose. L’ordre est donné par la Compagnie de construire une ville mais sans qu’aucune indication sur l’emplacement à choisir ne soit précisée, ni aucun moyen alloué par la France d’ailleurs !

Le choix d’une rade protégée pour abriter la flotte royale
Le Français du XVIIe siècle ne connait pas la géographie de la Martinique, île encore inconnue d’hier et qui vient d’être concédée à une société de commerce. Jacques Dyel du Parquet, lieutenant général de la Martinique depuis le 2 décembre 1637 et qui succède à d’Esnambuc, mort en 1636, est donc laissé libre de faire le choix de l’emplacement en toute connaissance de cause. S’il n’avait été qu’un gouverneur d’occasion, il aurait surement opté pour les vastes plaines du Lamentin qui paraissaient toutes indiquées pour servir d’emplacement à une grande et belle cité. Le Lamentin, mammifère aquatique qui peuple les rivages du site, dans ces zones marécageuses, au confluent de la rivière lézarde, fait surement fantasmer les amérindiens de l’époque qui le chassent pour son cuir, sa chair et son huile, jusqu’à le faire disparaitre mais en attribuant son nom à ce bout de pays noyé !

Autour, une grande plaine fertile permettait d’espérer pouvoir planter et cultiver ces nouvelles productions qui font fureur à Paris et dans toute l’Europe ! Mais, une raison majeure et d’un ordre tout différent, le détourne de ce point et l’oblige à en disposer autrement. La petite colonie naissante qui s’étage sur la pente du Fort Saint-Pierre n’est pas à l’abri d’une incursion des Caraïbes, dévalant en cascade des hauteurs de la Montagne Pelée, comme cela arrivera d’ailleurs dans la suite, et venant anéantir cet embryon d’établissement qui, de cent hommes qu’il comprenait le jour du débarquement, en compte encore tout juste deux cents dans le cours de l’année 1638.

La naissance de Fort Royal
Rapidement une rade, l’une des plus belles des Antilles, attire l’attention de Du Parquet. Doté d’une presqu’île propice à des fortifications, le « Cul de Sac Royal », actuelle baie du Lamentin présente de sérieux avantages nautiques et stratégiques. L’endroit est marécageux, inhospitalier, ce qui propage des maladies, dont la malaria, qui déciment ceux qui s’y aventurent, mais il est protégé et à l’abri des caprices du temps, des nombreux cyclones et des ouragans qui sévissent durant toute une période de l’année. Il est en eau profonde, la sûreté de la baie est propice à une bonne défense face aux ennemis et permet le mouillage des navires royaux. Il se décide donc à prendre plutôt position sur la petite presqu’île de roc qui s’avance dans la baie de Fort-Royal et qui s’appelle aujourd’hui le Fort Saint-Louis.

Soudée au reste de l’île par une étroite bande de terre de cent mètres de large au plus, elle peut être facilement défendue de ce côté, alors que, du côté de la mer, un vulgaire flibot permet de garantir les communications avec l’extérieur. Duparquet est persuadé d’avoir trouvé un second point de défense lui permettant d’assurer un lieu de repli à la colonie, au cas où, succombant sous le nombre, il serait contraint de lâcher pied à Saint-Pierre.

Il décide la construction d’un retranchement à l’extrémité sud de l’éperon qui ferme la baie, avec quelques planches de bois pour palissade. Il y affecte une garnison de deux cents hommes armés de quelques canons. Puis, à côté de rares cases indigènes dispersées un peu plus loin sur la terre ferme, il fait défricher quelques habitations qu’il plante en vivres et entraine quelques habitants qui imitent son exemple.

Ce camp devient le  » Fort-Royal  » en 1664, lorsque le roi achète les droits des successeurs de du Parquet. Après la destruction par une escadre anglaise des navires français mouillés à Saint-Pierre en 1667, il est décidé de renforcer le « Fort-Royal » en remplaçant les palissades par des ouvrages maçonnés, en étendant l’emprise à l’ensemble de la presqu’île.

Un dispositif efficace en temps de guerre

L’efficacité du dispositif est démontrée dès 1673 lorsqu’une escadre hollandaise venue attaquer les navires français au mouillage est repoussée par les canons du fort. De 1674 à 1703, de nombreux travaux renforcent la fortification sous l’impulsion des gouverneurs de Baas, de Blénac et d’Amblimont, avec l’assistance de l’ingénieur Payen.

Dans ce contexte de conflits avec les Caraïbes, les Hollandais et les Anglais, le site de Fort-Royal révèle son importance malgré le climat insalubre des marécages environnants. Le site est facile à défendre et bien protégé des tempêtes, ce qui n’est pas le cas de Saint-Pierre. Après le fort, il est donc décidé d’y bâtir une ville, Fort-Royal, dont la prononciation en créole donnera le nom des habitants de Fort-de-France : les Foyalais.

Il ne faut pas croire cependant que la ville projetée allait surgir un beau jour. Bien au contraire, le développement est extrêmement lent. On doit même abandonner un temps ce quartier que la proximité des marais rend inhabitable. En outre, de graves difficultés surviennent dans l’île, et qui sont de nature à paralyser net la meilleure bonne volonté. Les déboires de Duparquet avec de Poincy, sa captivité chez les Anglais, l’insurrection des Caraïbes, la liquidation de la Compagnie des Iles, l’acquisition de la Martinique par son gouverneur, son rachat par la nouvelle Compagnie des Indes Occidentales, puis par la couronne, la menace des Anglais, tout cela n’est pas fait pour donner de l’essor à un bourg à peine naissant. Jusqu’à la nature elle-même qui semble liguée contre lui : trois ouragans dans la même année de 1642, puis un autre, plus violent encore, en 1651 « qui n’a pas laissé de quoi nourrir un homme », puis, enfin, le tremblement de terre de 1651, où l’on croit que « la terre va s’ouvrir». Tout semble vouloir retarder la fondation définitive de la ville de Fort-Royal.

En 1662, cependant, le gouverneur des colonies françaises d’Amérique, le Comte de Blénac, décide de faire de Cul-de-Sac du Fort Royal, le chef-lieu de la colonie. Il scelle ainsi l’existence du bourg.

Des Brésiliens pour faire décoller la culture de la canne et la fabrication du sucre

En 1654, l’arrivée d’une population de juifs et protestants chassés du Brésil va impulser le développement de la monoculture de la canne à sucre autour de Fort-Royal. Duparquet refuse dans un premier temps d’accueillir 1200 réfugiés sous la pression des Jésuites au rappel que les règlements du roi interdisent la présence à demeure d’hérétiques. Qu’à cela ne tienne, les réfugiés trouvent asile en Guadeloupe. Charles Houël, le gouverneur, les accueille avec enthousiasme, les reçoit dans son château de Basse-Terre et les autorise à s’installer où ils le veulent. Il s’associe même avec l’un d’entre-deux pour la création d’une sucrerie. Apprenant que ce sont des experts de l’industrie sucrière, Du Parquet se ravise et accueille 300 d’entre eux en Martinique (les 900 autres restent en Guadeloupe). C’est un apport humain considérable qui entraîne une véritable révolution économique dans l’île. Il y a parmi ces personnes des maîtres de case hollandais, mais aussi des métis et des noirs qui constituent l’encadrement des habitations et qui connaissent les secrets techniques de la construction des moulins et de la fabrication du sucre.

Le gouverneur qui reproche aux Jésuites le fait d’avoir éconduit les premiers bateaux dont les occupants ont répandu l’or et l’argent en Guadeloupe, déclenchant le décollage économique de l’île voisine et concurrente, leur attribue aussitôt des terres au Cul de Sac Royal. Malgré tout, l’opération n’est pas aussi bénéfique que pour la Guadeloupe car à la suite d’une attaque caraïbe, certains d’entre eux abandonnent les lieux, regagnant la Hollande ou rejoignant leurs compatriotes de la Guadeloupe, tandis que d’autres, avec les juifs, se regroupent à Saint- Pierre où la plupart se lancent avec succès dans le commerce.

L’implantation des plantations sucrières
Le développement de pôles appelés « bourgs », suit une période d’installation de survie, pour se terminer par une diffusion du mode d’implantation à l’échelle insulaire, en vue d’une appropriation totale du territoire.
Progressivement les cultures vivrières du départ laissent place aux cultures spéculatives, alors que sur les littoraux, s’établissent des édifices militaires et que sont mises en place des églises, considérées alors comme nécessaires à l’équilibre spirituel. Ces trois éléments instaurés, la diffusion du mode d’occupation se développe, conférant aux bourgs des fonctions spécifiques : juridiques, économiques, militaires, relationnelles, fonctions auxquelles s’ajoute une forte idée de sociabilité. Cependant, l’occupation coloniale ne se fait pas de manière aléatoire et le site d’implantation des bourgs répond à des exigences particulières. Ils se trouvent généralement en plaine littorale, facilitant la communication nécessaire au développement du commerce, ainsi qu’à l’embouchure d’une rivière, l’eau étant indispensable à l’établissement humain. En outre, cette plaine est enserrée dans des mornes aux pentes abruptes, pour se protéger d’éventuels assaillants. Ainsi, la configuration du relief et l’exiguïté du territoire influencent-ils nettement l’implantation humaine.

Cependant ces unités côtières ne regroupent qu’une infime partie de la population insulaire. En effet, le système des plantations, basé sur la volonté de développer une production agricole de colonie vouée à l’exportation, est à la base d’un type particulier d’organisation spatiale, centré sur « l’habitation », installée sur la terre exploitée. Le littoral, dans ce système, a donc joué un rôle de service important, assurant principalement une fonction de commerce et d’échange, permettant la communication entre colonie et puissance coloniale.
Les bourgs sont édifiés dans un réseau réel, basé sur une politique de peuplement de la frange côtière, dont les principaux enjeux résident en la concession gratuite à titre précaire et révocable de l’usage de la réserve des «Cinquante Pas Géométriques ». Cet espace correspond à une zone de 81,2 m, constituant une réserve à des fins militaires et d’intérêt public. Cette zone est aussi une réserve de bois pour les navires et une terre d’accueil pour les artisans dont la présence reste indispensable à la survie de la colonie constituée de pêcheurs, maçons, serruriers, chirurgiens, tonneliers.

Une ville neuve sortie des marais

Peu à peu, la primitive citadelle est transformée en un fort, le Fort Saint-Louis, tel que nous le voyons actuellement. Le gouvernement s’occupe activement de l’assèchement de la ville. Une ordonnance du gouverneur De Baas, en date du 5 octobre 1669, accorde à Urbain Guillon, sieur de La Chamelle, procureur du roi dans l’île, une concession de deux cents pas de large de terre en pays plat situé au quartier de Fort-Royal, « à prendre depuis la rivière Levassor à venir vers le carénage et à chasser sa hauteur depuis les 50 pas du roi jusqu’au pied de la montagne appartenant à Madame de Gourselas ». Le plan d’alignement des voies de la future ville est approuvé par Colbert en 1671 et des aménagements hydrauliques sont réalisés à la fin du XVIIe siècle et au cours du XVIIIe siècle afin d’assainir le site marécageux et de le mettre à l’abri des inondations. Ainsi naît le quadrilatère de 42 hectares, au plan en damier, qui constitue le noyau urbain de Fort-de-France.

Le concessionnaire choisi exécute fidèlement son contrat, puisque dix ans une ville neuve s’est érigée sur cet emplacement. Quelques années après, l’intendant de la Compagnie prend à son tour une ordonnance par laquelle il permet à tout le monde de choisir un terrain « qu’il juge le plus commode dans la nouvelle enceinte, en suivant toutefois les alignements marqués dans un plan particulier déposé au greffe, afin que chacun pût y avoir recours au besoin ». C’est ainsi que commence la distribution des terres dans la ville encore marécageuse.

Les Capucins ont en partage avec les Jésuites une concession au Cul de sac royal, sur un petit morne « au-dessus du canal du carénage ». Ils desservent la plupart des paroisses du sud, le Cul de sac à vache (Trois-Ilets), le Diamant, les Anses d’Arlet, Sainte-Luce et le Cul de sac Marin. Les premiers prêtres de Fort-Royal sont donc des Capucins. Ils ont tout d’abord le titre d’aumôniers des troupes royales, et ce n’est que dix ans plus tard qu’ils reçoivent le nom de curé. A ce moment seulement, Fort-Royal sort de sa torpeur.

Un espace de défense de l’île
En 1672, la France et la Hollande sont en guerre, celle-ci s’exporte jusqu’aux îles. Sur les conseils de l’administrateur de l’île, Monsieur de Baas, le roi, Louis XIV, fait le choix de Port Royal plutôt que le Port de Saint Pierre, qui est trop exposé. Il ordonne d’y faire construire un Fort Vauban, avec garnison et Hôpital militaire.
En plus du Fort-Royal (devenu Fort Saint-Louis), bâti sur un éperon rocheux qui forme une avancée de 300 mètres dans la baie, le site de défense est renforcé par la construction des forts Tartenson et Desaix sur des mornes d’une altitude de 140 mètres surplombant l’actuel centre-ville.

En 1674, les défenses de Fort-Royal, encore relativement sommaires mais bien pourvues en artillerie, suffisent à repousser l’amiral de Ruyter dans sa tentative de s‘en emparer. Elles sont renforcées de 1674 à 1703. Guerre de Sept ans (1756 – 1763) En 1759 les Anglais échouent à leur tour. Mais en 1762, les troupes de l’amiral Rodney tirant les leçons de l’échec débarquent à Case-Navire (Schoelcher), investissent Fort-Royal et bombardent la place à partir des hauteurs avoisinantes. La leçon ayant porté, il est décidé, dès la restitution de l’île au traité de Paris, de fortifier le morne Garnier qui domine Fort-Royal. Les travaux de Fort-Bourbon (actuel Fort-Desaix) s’étalent de 1763 à 1778. Le fort devient le point clé de la défense.

Jusqu’en 1674, on ne peut trouver, dans tous les environs du quartier, que 120 colons et une seule petite chapelle, bâtie de fourches et de roseaux qui n’at d’autre luxe que l’extrême propreté avec laquelle l’entretient le vieillard qui y fait fonction ; Il faut attendre jusqu’en 1686 pour y trouver les marais desséchés, une quantité de bœufs, de cochons, de chevaux et de volailles, cinquante-sept distilleries et un bourg naissant.

En 1680, le gouverneur de Blénac sollicite du roi l’autorisation de transférer le gouvernement de Saint-Pierre à Fort-Royal. Ce ne fut pas sans peine. Paris ne répond pas, ou plutôt il dit de surseoir jusqu’à plus amples renseignements. De Baas décide alors de transporter tout simplement ses services avec lui à Fort-Royal, à l’exception du juge ordinaire qui doit s’y rendre tous les jeudis pour rendre la justice. On traite de gré à gré avec quelques propriétaires du quartier pour loger tant bien que mal tout le personnel, le gouverneur se réserve un terrain devant servir à son habitation et un autre pour le service judiciaire qui ne devient Palais de justice qu’en 1775.

Le siège du pouvoir Royal
Le 14 septembre 1681, le pavillon royal qui flottait jusqu’alors sur Saint-Pierre est transféré au Fort-Royal, en même temps que s’édifie autour la ville du même nom. L’intendant et les habitants de Saint-Pierre tentent de s’y opposer. Après bien des luttes le gouverneur général obtient, le 3 mars 1692, qu’y soient transférés les magasins du roi et que le Conseil supérieur y siège dorénavant. Sauf le marquis de Caylus tous les généraux y résident depuis 1692. Ville de garnison, ville de fonctionnaires, où peu de gros négociants fixent leurs établissements ; ville malsaine, que peu de créoles habitent ; mais ville à construire autour d’un fort embryonnaire et que le roi a résolu d’aménager en forteresse imprenable. Les artisans affluent dès sa fondation. N’y trouvant pas d’épouses ils s’y marient presque tous avec des mulâtresses. Le Fort- Royal va dès lors attirer les libres ayant un métier et qui végètent dans les bourgs, assujettis aux grands propriétaires, leurs seuls employeurs.

D’abord formés par les maçons, charpentiers, menuisiers métropolitains qui s’étaient alliés à des filles de couleur, ils y deviennent pratiquement les seuls artisans de 1700 jusqu’en 1823. En 1763, Louis XV fait bien venir quelques maîtres d’Europe pour améliorer le Fort-Royal et construire le fort Bourbon, mais la masse des ouvriers et entrepreneurs reste formée d’hommes de couleur libres. Tournés à l’origine vers les métiers du bâtiment, ils sont charpentiers, menuisiers, maçons, couvreurs, peintres. Quand la ville devient, après 1762, plus importante, les emplois se diversifient et l’on trouve dès lors des tailleurs, cordonniers, perruquiers, des tonneliers, des bouchers et des boulangers, quelques confiseurs et matelassiers, plusieurs forgerons, des pêcheurs, senneurs, marins, patrons de canot. Au début de la Révolution, les premiers orfèvres, les marchands et leurs font leur apparition. Après 1805, nous trouvons des instituteurs et des maîtres d’école, des habitants planteurs ainsi que des «propriétaires sans profession».

Sur ordre de Louis XV, un canal d’enceinte qui fait communiquer la rivière Levassor avec le Port, au droit de la Ravine Bouillé est tracé. Creusé par une levée de terre, ce qui lui conférera le nom de « Canal de la Levée », il a vocation à recevoir les eaux des mornes alentour et à assécher le site en contrebas. Mais de grandes maladies sévissent sur les troupes et retardent la réalisation. Les soldats du régiment de Périgord et du Vexin envoyés du continent sont enfin à l’œuvre mais il faut attendre 1766 pour que l’eau circule du carénage jusqu’à l’hôpital. Il est suffisamment large pour que Canots et chaloupes y entrent et passent sans quitter les rames sous les trois ponts qu’on a également construits : le pont d’Ennery, au Carénage, le pont Fénelon qui est aussi désigné sous le nom de pont Cartouche, à l’une des extrémités de la rue Schœlcher, et le pont Blondel ou pont de l’hôpital.

Une plaine qui se couvre de canne à sucre

Nous voici maintenant en 1783. La Martinique compte déjà 27 paroisses. La ville de Saint-Pierre s’est agrandie et embellie et compte 16.000 âmes; Fort-Royal, qui n’était autrefois qu’un vaste marécage, a été assaini par la création d’un canal reliant la rivière de l’hôpital au carénage. Un avocat, Simon Chovot, a complété cette œuvre d’assainissement par le comblement dans la zone des cinquante pas du Roi, de la pointe qui porte aujourd’hui son nom. Le bourg est devenu une ville de 10.000 habitants.

La plaine, les ravines et les mornes alentours sont couvertes de cannes à sucre, des dizaines d’habitations sucreries sont implantées sur le territoire à proximité des rivières Madame, Monsieur, de la Rivière Blanche, Levassor…, de tous ces cours d’eaux qui descendent des mornes vigoureux et des montagnes et qui servent au transport des boucaux de canne à sucre et des futailles de rhum. Rivières et canaux sont alors quotidiennement empruntés par des myriades de canots et gabarres, les berges se couvrent de commerces, de fabriques, d’artisans… qui rythment la vie des habitants. Peu à peu ces habitations vont comme partout en Martinique disparaitre au profit des nouvelles distilleries, puis des usines centrales regroupées près du littoral et ces voies d’accès.

De Fort Royal à Fort de France
Pendant ce temps et au gré des batailles et des victoires, Fort-Royal change de nom : Fort Louis, Fort Edward lors des occupations anglaises, Fort Saint-Louis à partir de 1814. Son nom définitif de Fort de France est enfin adopté sous la 2e République et la ville tout comme l’ensemble du territoire entame une nouvelle phase de développement. Après l’abolition de l’esclavage, les foyalais sont de plus en plus nombreux dans le centre mais aussi dans les quartiers environnants qui commencent s’urbaniser après 1848 et tout le long de la seconde moitié du siècle. La sole agricole qui a longtemps fait les beaux jours du territoire se réduit et se concentre sur la plaine du lamentin et les hauteurs de Saint Joseph. Dans le même temps, le territoire concentre une quinzaine de distilleries industrielles ou agricoles qui fournissent de grandes quantités de sucre et de rhum. Fort-de-France se positionne dans la vie économique, du fait, notamment, de nouvelles activités portuaires qui génèrent d’importants trafics. Le port de Fort-de-France est l’un des plus vastes et des plus sûrs des Antilles entre le carénage où les navires se trouvent sous la protection du Fort Saint-Louis et la rade des Flamands.
Le cabotage s’organise aussi depuis les embarcadères sur la Rivière Lézarde, les trois îlets, Rivière Salée, Case des Navires qui vient de prendre le nom du l’abolitionniste Schoelcher… et les va et viens des barques est incessant au cœur de l’espace maritime de Fort de France.

Mais voilà que le XX° siècle s’annonce avec une catastrophe inimaginable. Le 8 mai 1902, Saint-Pierre est anéanti par l’éruption de la montagne Pelée. Au-delà des énormes pertes humaines, les conséquences pour la Martinique et Fort de France en particulier sont énormes. La ville accueille les sinistrés venus de tout le nord de l’île et hérite parallèlement de toute l’activité commerciale et de négoce jusqu’alors restées à Saint Pierre. Un défi gigantesque et inattendu est à relever : assumer d’être l’unique Ville de l’île !

En quelques décennies seulement Fort de France déploie ses ailes, gagne les hauteurs, crée de nouveaux quartiers, et multiplie par quatre sa population. Le site inhospitalier, cerné de marécages, menaçant de la malaria, dévasté par des fléaux aussi divers que tremblement de terre, incendie, cyclone, est désormais la Ville, la plus importante et la plus peuplée de la Martinique. Ville-Capitale, Fort de France polarise l’espace martiniquais, et doit répondre aux exigences tant des administrés résidents que des milliers de citoyens qui quotidiennement, travaillent en son Centre, ou le traversent. C’est désormais un centre commercial, portuaire, administratif et touristique.

Un territoire pour construire l’histoire du futur
Fort-de-France doit son existence et son développement à la volonté et à la ténacité des hommes qui ont su relever bien des défis avant d’affirmer, de manière incontestable au XXe siècle, sa place comme Ville-Capitale.
Cette chrysalide qu’une main hardie a posée sur un marais humide, s’est dégagée lentement de sa coque pour devenir une fleur éclose et souriante posée sur la mer des Caraïbes, sous la protection des pitons du carbet qui signent son horizon, entourée des plus belles mangroves, bercée par les mornes et nourrie par les flots calmes ou tempétueux des multiples rivières qui descendent en cascades jusqu’aux anses baignées d’une eau turquoise. Du petit port de Cohé jusqu’à la plage de la Case des Navires, du Fort saint Louis aux espaces bucoliques de Saint Joseph, ce territoire vous offre des paysages multiples, une architecture métissée, une nature exubérante qui a trouvé sa place dans les creux, sur les hauteurs, au bord de l’eau ; il vous invite à rencontrer des hommes qui ont su faire perdurer des savoir-faire ancestraux et fabriquent aujourd’hui l’histoire de demain.